Dissémination de mai: «L’Amérique»
«La première poésie américaine, une description d’incendie, que Karl put un soir réciter à son oncle, rendit cet homme solennel tant il en eut de satisfaction. Ils se tenaient debout à la fenêtre de Karl; l’oncle regardait dans le soir où toute la clarté du ciel avait sombré, et il frappait lentement en cadence dans ses mains, emporté par le sens du rythme, tandis que Karl se tenait tout droit à côté de lui et s’arrachait, le regard fixe, la difficile poésie.»
Franz Kafka, L’Amérique (trad. A. Vialatte)
En dehors de donner à ses livres des titres à l’infinitif, l’écrivain français contemporain paraît touché par une obsession récente, celle d’écrire un roman américain. Western, polar, roman-fleuve, roman de gare ou psychologique, peu importe le genre du moment qu’on est transporté en Amérique. Une Amérique qui se résume d’ailleurs bien souvent à sa partie états-unienne. Tanguy Viel a tiré du phénomène un petit livre précieux et ironique, plutôt drôle: La Disparition de Jim Sullivan. Mais passé l’ironie, il peut être intéressant de se demander d’où provient et ce qu’exprime ce nouveau tropisme. Serait-ce, comme semble le soutenir métaphoriquement Pierre Senges dans La Réfutation majeure, que l’Amérique n’existe pas et ne fut jamais au fond qu’un complot n’ayant d’autre but que «de nous rendre notre continent odieux, et finalement invivable» ? Et si l’Amérique existe bel et bien, il pourrait être intéressant alors, plus simplement, de se plonger au coeur vivant du Nouveau Monde pour vérifier combien différemment il palpite.
La dissémination de ce mois-ci vous invite en voyage. Voyage en Amérique à travers la Toile.
Rendez-vous le vendredi 30 mai.