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C’est Robert Walser qui s’exclame un jour: « Je veux écrire des lettres au monde entier ! ». Nombre de ses petites proses ressemblent à des lettres qu’il aurait postées dans un village, parti sur les chemins de Suisse (Walser, on le sait, était un grand marcheur). Qu’aurait-il fait d’une machine lui permettant d’écrire et de publier en chemin, en pleine nature ?

Dernièrement, je regrettais ici même que Kenneth White n’ait pas raconté son voyage au Canada directement sur un blog au lieu d’en faire un livre: il aurait eu certainement plus de lecteurs (même lui) ! J’ai relaté personnellement un séjour aux Kerguelen en étant connecté depuis là-bas, il est désormais possible de se servir du web un peu partout dans le monde, dans les coins les plus reculés, voire dans l’espace (je suis au quotidien les tweets de quelques astronautes de la station ISS).

On a tous lu de ces « relations de voyage » écrites par des hommes ou des femmes qui n’étaient pas forcément écrivains, mais qui saisis par l’expérience du voyage ont eu envie de la transmettre à leurs semblables. Dans les récits de voyage écrits par des écrivains en devenir (je pense aux lettres de Flaubert avançant sur le Nil), on assiste souvent à une transformation dans l’écriture elle-même, les lieux traversés, les événements vécus influant directement sur celui ou celle qui est en route (Michaux dans Ecuador).

Alors, que faisons-nous maintenant que nous pouvons effectivement écrire au monde entier en temps réel ? Où sont-ils, ces récits de voyage numériques ? Lors de cette dissémination (rendez-vous le dernier vendredi de septembre, soit le 26), priorité sera donnée à des auteurs contemporains, mais des échos d’auteurs voyageurs du passé sont aussi envisageables: après tout, pourquoi Linné en Laponie ne tiendrait-il pas un blog aujourd’hui ? Cela le rendrait plus moderne que pas mal de nos auteurs contemporains, plus que jamais cloués à leurs villes et à leurs éditeurs.