La revue disséminée: « L’assassin habitait chez toi »
Le thème de cette dernière dissémination mensuelle de la saison était: « J’ai rêvé que tu écrivais un roman policier. L’assassin habitait chez toi ». Thème proposé par Renaud Schaffhauser et qui était une invitation à l’écriture d’une nouvelle ou d’un récit.
- Sur Glossolalies, Noëlle Rollet est l’auteur de L’assassin rêvé, « une enquête émaillée de textes précédemment disséminés » sur son site, ce qui est aussi l’occasion de redécouvrir d’autres textes et d’autres auteurs.
- Aline Royer propose la lecture d’un court récit de Julio Cortazar, Continuité des parcs, « mise en abyme de l’expérience du lecteur », écrit-elle suite à sa propre approche du thème proposé:
J’aime assez l’idée que tout parte du rêve. En lisant ces deux phrases : « J’ai rêvé que tu écrivais un roman policier. L’assassin habitait chez toi », on se met spontanément à le poursuivre, ce rêve. Pour ma part, il m’est tout de suite apparu évident que l’auteur du roman policier devait mourir sous les coups de l’assassin qui habite chez lui. L’intrusion du personnage de l’assassin dans le réel ne pouvait que signer la mort de l’auteur. La présence de l’assassin dans une pièce voisine appelait nécessairement la disparition de l’auteur avançant dans son intrigue, penché sur son clavier – mais vous-mêmes, vous y aurez sans doute également pensé ?
- Renaud Schaffhauser partait du tweet initial responsable de cette dissémination, où un certain auteur (de tout sauf de romans policiers !) s’échinait justement à en écrire un. Et surtout, il nous proposait la lecture d’un extrait de Clair de crime du grand Werner Kofler.
La fiancée et Mme Zimmermann se mettent toutes deux à chercher le portier de nuit, d’abord en ouvrant et inspectant toutes les chambres non occupées. (Le ciel se couvre, un front d’orage approche. Le narrateur nous mène par les escaliers et corridors de l’hôtel ; ça sent le crime, ici, il devait arriver quelque chose. Aha, la chambre numéro 24, la porte est ouverte. Très suspect. Quelqu’un ? il y a quelqu’un ? Non, plus personne ici, personne dans la maison. Couloir, enfilade de chambres, la caméra légère pivote.)
- Giovanni Merloni nous propose une superbe réflexion sur l’Italie et l’histoire du cinéma italien. Y est notamment questionnée la responsabilité des artistes et en l’occurrence des acteurs dans la corruption généralisée de la parole.
Qu’est-ce qu’il arrive, au juste ? Où est le délit ? Qui se chargera de le découvrir et punir les coupables ? Existe-t-il encore le châtiment ? Et, s’il a changé d’efficacité et de poids, qu’est-ce que ça veut dire, aujourd’hui, le délit ? Et, pour revenir au rêve qui nous est indispensable pour vivre, qu’est-ce qu’on va faire contre les délits qui tuent la parole ?
- Sur Oeuvres ouvertes enfin, carte blanche à un auteur contemporain, Comte Kerkadek, qui propose un récit sous forme de feuilleton (publication sur une semaine) intitulé Merci pour ce macchab’, nouvelle des origines.
— Kerkadek, mon ami, arrête de pleurer, comme ça devant tout le monde, parce qu’une demi-vieille, parce qu’une fausse blonde a encore refusé ton manuscrit. Non Kerkadek, t’es pas tout seul. Surtout n’oublie jamais qui tu es : tu es un grand marin, un écrivain aventurier des mers et des océans. Et tu crois qu’avec ça, le commun des mortels pourrait comprendre ce que tu écris ?!
Il avait raison. Ce sont probablement ces paroles qui me donnèrent cette idée, une idée qui changea ma vie, mais surtout qui changea la sienne. Cette idée, je la regretterai jusqu’à la fin des temps. Mais l’homme d’action que je suis, que j’ai toujours été, sait qu’il ne sert à rien de regretter.
Et voici ce que je dis (si les mots avaient pu s’étrangler dans ma gorge à cet instant, si un câble à haute tension avait pu tomber sur le quai mouillé et mettre fin à mes jours, mon pauvre ami…) :
— Et si ce roman policier, on l’écrivait ? Tous les deux, mon ami ?
J’aime beaucoup ce thème. Je l’ai raté. je viens juste de le découvrir ! 😉 Bon été.